Entre 1961 et 1962, mon père à l’aide d’un petit Leica prend ses premières photos. L’adolescent semble avoir, entre autre, une fascination pour les monts enneigés. Les photographies noir et blanc transportent une nostalgie esthétique, où autant de neige se fait rare. Certains tirages ont les bords ciselés, rappelant avec justesse les montagnes aux reliefs inégaux. Il y a dans ces images prises par un adolescent inconnu, devenu mon père, une poésie troublante, un mystère déroutant. Comment était ce jeune homme au petit Leica ? Que souhaitait-il exprimer au-delà de la beauté du paysage helvétique ? Cherchait-il seulement à immortaliser ses vacances alpines ? Peut-être est-ce propre aux enfants d’être troublés de découvrir une tranche de vie de leurs parents, alors qu’ils n’existaient pas ? Une vie avant eux. Quelque peu banal et pourtant de l’ordre de la surprise et de la découverte. Cet homme, ce père aimé, contient en lui les souvenirs des évènements de son passé telles les pièces d’un puzzle du paysage intérieur lui appartenant. Au milieu du 19ème siècle, alors que la photo couleur n’existait pas, la colorisation des photographies noir et blanc était courante et une tâche minutieuse réservée aux femmes. Je dessine beaucoup et lorsque je taille mes crayons, il reste des petits fragments de mines cassées. Je souhaite rendre hommage à mon père, rendre hommage à ces petits tirages noir et blanc en colorant à ma façon ses images.


24 boîtes noires avec couvercle coulissant
168 x 124 x 360 mm
photographie sur papier barythé
graphite sur photographie
5 exemplaires
2016

 


Zwischen 1961 und 1962 fotografierte mein Vater mit Hilfe einer kleinen Leica seine ersten Bilder. Der Jugendliche scheint, unter anderem, eine Faszination für die schneebedeckten Berge gehabt zu haben. Die schwarz-weißen Fotografien transportieren eine ästhetische Sehnsucht in eine Zeit, in der so viel Schnee selten geworden ist. Manche Abzüge haben gezackte Ränder; es erinnert genau an die Konturen der Berge. 
Es gibt in diesen Bildern, aufgenommen von einem unbekannten Jugendlichen, der mein Vater geworden ist, eine verwirrende Poesie, ein unerwartetes Geheimnis. Wie war dieser junge Mann mit der kleinen Leica? Was wollte er jenseits der Schönheit der helvetischen Landschaft auszudrücken? Versuchte er nur seine Alpenferien zu verewigen? Vielleicht gehört es zu Kindern, erstaunt zu sein, eine Lebensscheibe von ihren Eltern zu entdecken, als sie noch nicht existierten? Ein Leben vor ihnen. Auch wenn es ganz banal klingt, bleibt es doch eine überraschende Entdeckung. Dieser Mann, dieser geliebte Vater, trägt die Erinnerungen an die Ereignisse seiner Vergangenheit wie Puzzleteile einer Innenlandschaft, die nur ihm gehört. In der Mitte des 19. Jahrhunderts, als farbige Fotos nicht existierten, war die Kolorierung der Schwarz-Weiß-Fotografien üblich und eine akribische Aufgabe, die für Frauen reserviert war. Ich zeichne viel und wenn ich meine Buntstifte anspitze, bleiben kleine Fragmente der zerbrochenen Minen. In meiner Weise habe ich die Bilder meines Vaters gefärbt. Damit möchte ich meinen Vater und diese kleinen Schwarz-Weiß-Abzüge würdigen.

 

24 schwarze Holzschachteln mit Schiebedeckel
168 x 124 x 360 mm
Fotografie auf Barythpapier
Grafit auf Fotografie
5 Auflage
2016

 

Ferme de la Chapelle, Lancy