1 livre, 33 textes, 50 pages, 10 x 18 cm, 130 exemplaires, 2002

1 Buch, 33 Texte, 50 Seiten, 10 x 18 cm, 130 Auflage, 2002

 

 

La feuille en papier

17h dans le magasin Zara, assise devant les cabines d’essayage des hommes, j’observais. Le battant de la porte ne descendait pas jusqu’au sol, il permettait de voir les pieds des gens. Dans la première cabine, il n’y avait personne, dans la deuxième un homme d’un certain âge, la troisième cabine attira mon attention. Un jeune homme était entré quelques minutes auparavant tenant une paire de pantalons. Maintenant son petit jeu de jambes m’intéressa. Devant le miroir, il avait posé à terre une feuille en papier sur laquelle il marchait en chaussettes. Il s’appliquait, tout en enfilant un pantalon, à ne pas poser ses pieds déchaussés sur le sol du magasin. Il se tournait, se retournait, s’admirait dans la glace sans dépasser le périmètre de la feuille. Afin de pouvoir sortir de la cabine, il remit lentement ses chaussures l’une après l’autre, appuyé à la paroi.

 

Le carton

Je posai le carton sur le trottoir. Un grand carton plein d’objets que je ne désirais plus. Il faisait beau ce dimanche, je m’installai sur le balcon. D’un œil, je surveillais le carton. Certains passants semblaient s’y intéresser. Un vieux monsieur promenant son chien farfouilla l’air de rien. Il regarda à droite puis à gauche avant de repartir un couvercle de casserole à la main. Deux petites filles établirent un instant leur campement autour du carton. Elles détaillèrent lentement son contenu. Toute contentes, elles repartirent chacune avec un trésor, un vieux bougeoir bleu ciel et une théière décolorée. Le lendemain, le carton en son entier avait disparu.

  

Le coup de téléphone

Peter m’appela, il voulait m’inviter à manger. J’acceptai. Nous fixâmes la date, on parla encore un peu, puis on se dit au revoir et je raccrochai. Quelques minutes passèrent puis je repris le téléphone. Au lieu d’avoir la tonalité, j’entendis Peter parler avec son amie. Soudain je me sentis projetée dans leur cuisine sans invitation. Je raccrochai. Je cherchai un moyen de les prévenir. Je ne pouvais pas utiliser mon téléphone et le leur était occupé. Je décrochai à nouveau, j’attendis, j’écoutai un peu, ils parlaient en anglais, ils parlaient d’une femme, puis de leur mariage, ils cherchaient la meilleure date, gênée je ne souhaitais pas écouter leur conversation.

Je me levai et tentai quelque chose. J’allumai la chaîne stéréo, je pris un CD, j’enclenchai la musique, j’approchai le combiné du téléphone sans fil et je montai le son.

Immédiatement j’entendis le bip habituel.

 

Les deux types

Un jour dans une rue piétonne, je pris des clichés des passants. Je mitraillais avec ma caméra ; les enfants, les personnes âgées, les marchands, les cyclistes.

Lors du développement, je me rendis compte que sur chaque tirage se trouvaient, en plus du sujet photographié, deux types, flous en arrière plan, dans un coin, à moitié cachés par un arbre, partiellement coupés. D’une image à l’autre je pouvais suivre leur itinéraire. J’avais le sentiment d’avoir été devancée, non pas par ces deux personnages, mais par l’image elle-même. Comme si malgré mon cadrage réfléchi, l’image sélectionnait ses propres sujets.

 

La filature

À la suite de cette expérience, je choisis de suivre volontairement deux types. De prendre en image leur parcours dans la ville. Je sélectionnai deux hommes qui ne semblaient rien faire d’autre que de simplement se balader. Ils marchèrent plusieurs kilomètres. De quartier en quartier, je tentais de me faire plus discrète. Vite ils remarquèrent mon manège, mi-amusés, mi-inquiets. Je tentais de les suivre de loin, risquant presque de les perdre. Finalement ils rentrèrent dans un café pour ne plus en ressortir.

Je fus à mon tour surveillée. Un de leur ami sortit fréquemment du café, l’air de rien, pour constater ma présence. Gênée je décidai de partir.

 

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Das Blatt Papier

17 Uhr im Modehaus Zara, und ich saß vor der Männerumkleide und stellte Beobachtungen an. Die Kabinentüren reichten nicht bis auf den Boden, so dass ich die Füße der Leute sehen konnte. Die erste Kabine war frei, in der zweiten befand sich ein älterer Mann, die dritte Kabine erregte meine Aufmerksamkeit. Einige Minuten zuvor war ein junger Mann mit einer Hose hineingegangen. Jetzt war ich gespannt darauf, was er mit den Beinen anstellte. Er hatte ein Blatt Papier auf den Boden vor den Spiegel gelegt. In Socken trat er darauf. Er bemühte sich, beim Anziehen die Hose den Boden des Ladens nicht mit den Füßen zu berühren. Er drehte sich hin und her und bewunderte sich im Spiegel, ohne die Grenzen des Blattes zu übertreten. Um die Kabine verlassen zu können, zog er sich, gestützt an die Wand, langsam wieder die Schuhe an, einen nach dem anderen.

 

Der Karton

Ich stellte den Karton auf dem Bürgersteig ab. Es war ein großer Karton voller Gegenstände, die ich nicht mehr brauchte. Es war schön an diesem Sonntag, und ich setzte mich auf dem Balkon. Aus dem Augenwinkel beobachtete ich den Karton. Einige Passanten schienen sich für ihn zu interessieren. Ein älterer Herr, der seinen Hund ausführte, stöberte ganz unauffällig in dem Karton herum. Er schaute nach rechts und links und ging dann mit einem Topfdeckel weiter. Zwei kleine Mädchen ließen sich kurz um den Karton herum nieder und untersuchten gemächlich seinen Inhalt. Ganz zufrieden zogen sie mit ihren Schätzen weiter, die eine mit einem alten, hellblauen Kerzenhalter und die andere mit einer Teekanne mit verblichener Glasur. Am nächsten Tag war der Karton ganz verschwunden.

 

Der Anruf

Peter rief mich an, um mich zum Essen einzuladen. Wir legten einen Termin fest und redeten noch ein wenig, dann verabschiedeten wir uns, und ich legte auf. Ein paar Minuten später griff ich wieder zum Telefon. Doch statt des Freizeichens hörte ich Peter, der mit seiner Freundin sprach. Plötzlich fühlte ich mich in ihre Küche, in ihre Gesellschaft katapultiert, ohne Einladung. Ich legte wieder auf und überlegte, wie ich den beiden Bescheid geben konnte. Über mein Telefon ging es nicht, und ihr Anschluss war besetzt. Ich hob noch einmal ab, wartete und hörte eine Weile zu. Sie sprachen Englisch und redeten über eine Frau, dann über ihre Hochzeit und berieten über das beste Datum. Mir war das peinlich, und ich mochte ihr Gespräch nicht hören.

Ich stand auf und probierte etwas aus. Ich machte die Stereoanlage ein, legte eine CD auf und schaltete ein. Dann hielt ich das schnurlose Telefon an die Anlage und drehte die Lautstärke hoch.

Sofort hörte ich das gewohnte Freizeichen.

 

Die zwei Männer

Eines Tages fotografierte ich in einer Fußgängerzone Passanten. Ich schoss Bilder von Kindern, alten Leuten, Markthändlern und Radfahrern.

Beim Entwickeln der Fotos fiel mir auf, dass auf jedem Abzug außer den fotografierten Motiven noch zwei Männer auftauchten: unscharf, im Hintergrund, in einer Ecke, halb verdeckt durch einen Baum oder teilweise abgeschnitten. Von einem Bild zum anderen konnte ich ihren Weg verfolgen. Ich hatte das Gefühl, überholt worden zu sein; nicht von diesen beiden Personen, sondern durch das Bild selbst. Als hätte das Bild selbst sich, trotz meiner gut überlegten Kameraeinstellung, seine Themen selbst ausgesucht.

  

Beschattung

Nach dieser Erfahrung entschied ich mich, dieses Mal bewusst zwei Männern zu folgen und ihren Weg durch die Stadt in Bildern festzuhalten. Ich suchte mir zwei Männer aus, die anscheinend einfach spazierengingen. Sie legten mehrere Kilometer zurück. Von Viertel zu Viertel versuchte ich, mich unauffälliger zu verhalten. Doch sie durchschauten mein Spielchen rasch und wirkten halb amüsiert und halb beunruhigt. Ich versuchte, ihnen aus der Ferne zu folgen und hätte sie beinahe verloren. Schließlich betraten sie ein Café und kamen nicht wieder heraus.

Jetzt wurde ich umgekehrt beobachtet. Einer ihrer Freunde kam ständig mit harmloser Miene aus dem Café gelaufen, um nachzusehen, ob ich noch da war. Peinlich berührt, beschloss ich zu gehen.